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Trouver un équilibre entre la protection et l'utilisation

L'élagage des palétuviers fournit du bois, mais c'est un travail laborieux. (c) Eco-Bénin - Juste DJAGOUN

Bénin – Lorsque des zones naturelles reçoivent un statut de protection, il est essentiel de trouver un équilibre entre la préservation et la conservation des services que la nature offre à l’homme. Cela s’applique également à la réserve naturelle protégée de Bouche-du-Roy.

Les canaux de navigation jouent un rôle déterminant dans la circulation des personnes et des biens dans l’Aire Communautaire de Conservation de la Biodiversité Bouche-du-Roy (ACCB-BR). Elles assurent à elles seules, près de 80% des déplacements des populations entre villages et vers les marchés et autres lieux importants de cette plaine alluviale. Ces canaux sont essentiellement bordés de mangroves notamment, des peuplements à Rhizophara racemosa dont la densité s’est accrue depuis une dizaine d’année grâce aux mesures de protection et de conservation de l’écosystème.

Déplacements pénibles par voies d’eau

En effet, cette espèce de palétuvier est très vulnérable dans son biotope à cause de la pression des populations riveraines pour l’exploitation de son bois (énergie et service). La création de la réserve et le renforcement des actions de sensibilisation orientées vers la protection de la mangrove ont permis une réduction de la pression de coupe et une augmentation de la superficie occupée par celle-ci. Parmi les dispositions qui visent à protéger les écosystèmes de mangroves au Bénin, on peut citer le plus récent qui est un arrêté préfectoral émis le 30 juin 2023 portant « interdiction de l’exploitation des mangroves dans le département du Mono».

Face à toutes ces mesures, la croissance de la mangrove tend de plus en plus à occuper l’emprise des canaux de navigation, rendant pénibles les déplacements par voies d’eau et occasionnant des chavirements de pirogues. Pourtant, le besoin de procéder à l’élagage de la mangrove au niveau des canaux de navigation émane des désirs formulés par les populations déjà en 2021 lors de l’évaluation des impacts sociaux liés à l’existence de l’ACCB-BR.

Dans le cadre de la mise en œuvre du programme MYP5 2022-2026, ces besoins ont été confirmés lors du diagnostic et de l’analyse des problématiques du plaidoyer. Ainsi, un trajet de plaidoyer a été développé avec le partenaire Eco-Benin et a abouti à une autorisation formelle ponctuelle de l’élagage de mangroves le long des canaux délivrée par l’Inspection Forestière.

Haute Intensité de Main d’œuvre (h/f)

Au regard de la multiplicité des voies d’eau, des réunions communautaires ont été organisées dans les villages concernés afin d’identifier et de prioriser les canaux à élaguer. Les canaux ciblés ont ensuite été cartographiés avec l’élaboration d’un protocole de mise en œuvre des travaux qui s’est fait selon l’approche de Haute Intensité de Main d’œuvre (HIMO) avec une forte mobilisation communautaire. Des équipes de travail ont été mobilisées dans tous les villages/hameaux concernés en tenant compte du genre : l’équipe des hommes (55%) assure le dégagement des voies d’eau et celle des femmes (45%) assure le ramassage et transport des rémanents vers les villages.

Un comité de suivi conformément au protocole établi a été mis en place et est composé de tous les groupes d’acteurs concernés (forestier, mairie, comité de gestion ACP Doukpo, communauté bénéficiaire, élus locaux).

9,525 Km de mangroves ont été élagués sur une section moyenne de 12 mètres.

 

Texte et photos : EcoBénin, Juste DJAGOUN
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Témoignage

Le Canal qui mène dans mon village Lanhou était vraiment encombré. A plusieurs endroits, il était impossible de déployer complètement la pagaie sans risque de le voir pris en otage dans la canopée. Nous enregistrions régulièrement des chavirements de pirogue, notamment les femmes parfois avec leur bébé au dos, de retour du marché de Comè qui tombait à l’eau avec leurs marchandises. Depuis la fin des travaux de dégagement, ces situations malheureuses ne surviennent plus. Nous remercions Join For Water et Eco-Benin qui ont appuyé l’ACP Doukpo pour parvenir au résultat que toute la communauté salue.

Hademè Debgoe, Commerçante, Présidente de l’Association Villageoise d’Epargne et de Crédit de Lanhou.